Ghjuvan Battista Acquaviva : cumbattante di u Fronte, cascatu per a Liberta

Le 15 novembre 1987, Ghjuvan Battista Acquaviva trouve la mort suite à une opération commando du FLNC, dans la ferme du colon « pied noir » Louis-Ferdinand Roussel, à U Querciolu sur la commune de Sorbu Occugnanu. Ce 15 novembre à 20h15, Madame Roussel appelle la gendarmerie de Viscuvatu pour affirmer que son mari a été victime d’une agression à leur domicile. Elle précise que l’auteur de l’agression a été mortellement blessé. A 20h30, les gendarmes sous le commandement du capitaine Jobic arrivent sur place et constatent que dans le bureau de L.F Roussel, un homme gît à terre. Son visage est dissimulé par une cagoule, et ses mains gantées. Il porte à la ceinture une arme automatique et une grenade défensive. Il a été abattu d’une balle dans le visage. Dans sa déposition, L.F Roussel donne comme arguments qu’alerté par les aboiements d’un de ses chiens de garde, il sort sur le seuil de la porte de son bureau, et se trouve alors en présence d’un individu cagoulé qui le menace de son fusil. Une lutte s’engage entre les deux hommes. Un coup de feu part en direction du plafond. Malgré un violent coup asséné par son agresseur, Roussel réussit à se saisir du fusil qu’il tient à deux mains. Un second coup de feu, mortel celui-là part de l’arme de la victime. La version devient sans autre forme de procès la version officielle. À 22 heures, le procureur Bot et le commissaire Dragacci arrivent, puis à 22h30 le Docteur Nicolaï, il soigne Roussel « pour une égratignure à un pouce », invoquant des urgences il quitte les lieux sans se préoccuper de l’homme mort. Il ne reviendra qu’à minuit pour établir le constat de décès. L’autopsie sera pratiquée le 17 novembre. Elle conclura que la mort est due au tir d’une balle à bout portant qui n’est pas ressortie du crâne. Etant donné le calibre de l’arme, un Valmet 222, cela est inimaginable. Sauf si… Ghjuvan’Battista n’a pas été tué accidentellement par son propre fusil, mais abattu froidement comme le précise le communiqué du FLNC (1) d’une balle partie d’une autre arme. L.F Roussel possédait 3 armes. Aucune n’a été examinée au titre de l’enquête, ni saisie, assez incroyable dans une affaire où il y a mort d’homme. Comme le comportement du capitaine Jobic et de ses gendarmes, le lieu du crime n’est pas contrôlé, ils ne cherchent pas à savoir si des charges explosives ont été déposées aux abords, ou dans la ferme et ses dépendances. En fait, les forces de police réunies, policiers, gendarmes et magistrats se comportent comme s’il y avait eu un guet- apens tendu à Gjhuvan’Battista après le départ du commando, alors que rien ni personne ne représentait plus une menace pour Roussel. Le corps de Ghjuvan’Battista ne sera remis à sa famille que trois jours après le drame. Le 18 novembre, L.F Roussel disparait, le capitaine Jobic lui a procuré un billet d’avion et des faux papiers d’identité au nom de Levati. Une fois en France, Roussel est pris en charge par un réseau téléguidé par Charles Pasqua alors ministre de l’Intérieur. Pourquoi cette fuite si les faits s’étaient déroulés selon la version officielle donnée par Roussel à la justice ? Sur l’île la colère gronde suite à ce qui est une évidence, l’assassinat du jeune militant du Front, et surtout dans sa région d’origine la Balagne où sa famille est honorablement connue, à commencer par son père Maurice, militant historique de la lutte Nationale. Le 20 novembre, le mobilier de la ferme pourtant sous scellés, et sous la surveillance des gendarmes disparait à son tour. Roussel déclarera par la suite l’avoir vendu à des brocanteurs pour la somme de 50.000 francs. Or les meubles n’ont été ni vendus ni mis en vente. Ils ont été déménagés par une entreprise insulaire, puis déposés dans un garde-meubles de Fréjus. Ils seront retirés le 16 novembre 1989 par le fils Roussel médecin à Nice. A la demande expresse d’Alain Juppé alors ministre du Budget, la ferme Roussel est achetée au prix de 580 millions de francs par le ministère de l’agriculture. Elle servira à loger des compagnies de CRS en déplacement en Corse. Le 10 octobre 1989, cela n’empêchera pas le vol de la porte d’entrée d’aucune valeur marchande, mais elle aussi pièce à conviction, comme le mobilier. Pièce à conviction essentielle dans le dossier ; car elle porte les traces d’un impact de balle, qui peut permettre de déterminer l’origine, la trajectoire et le calibre du projectile qui y était planté. Mais la liste des anomalies de cette affaire est encore longue. Il s’avère que le plan des lieux établi par la gendarmerie est falsifié. Le gravier qui borde la villa à un endroit bien précis a été remplacé depuis peu. Certainement portait t’il des traces de sang, preuves que Ghjuvan’Battista n’avait pas été abattu en agressant Roussel dans son bureau, mais à l’extérieur alors que le commando partait. Lors de l’autopsie, le Dr Bastien note « la présence au niveau de la partie occipitale* de gravillons, due probablement à la chute… » (partie occipitale : située à l’arrière du crâne). Donc une chute sur le gravier et non pas sur le sol d’un bureau. Encore pire ! 4 fragments de la balle extraite du corps de Ghjuvan’Battista avaient été placés sous scellés par le médecin légiste. Or, le plus volumineux, le plus « parlant » pour l’enquête a disparu. Il ne figure pas dans l’inventaire des pièces à conviction dressé le 18 novembre. Les 16 et 18 janvier 1990, plus de deux ans après les faits, sur les lieux même du drame une reconstitution est fixée. Roussel et tous les autres protagonistes de la mise en scène refusent. Le juge Sievers, nouveau magistrat en charge du dossier après le juge Catalano, envisage de procéder à une véritable enquête avec rétablissement du plan des lieux tels qu’ils étaient le soir du meurtre, et contraindre Roussel, au besoin par la force de la loi à être présent. Il sera dessaisi du dossier… Pendant deux ans plus aucune procédure n’aura lieu en France. L’affaire est portée devant la Cour Européenne et la Commission des droits de l’homme à Strasbourg. Par 23 voix sur 24 les instances judiciaires européennes se montrent favorables à l’examen des Mémoires de la famille Acquaviva demandant que soit reconnue la violation par la France des droits de la partie civile. Le gouvernement français fera des pieds et des mains pour éviter une condamnation hautement justifiée. En 1995, après de nombreux débats la Cour Européenne des droits de l’Homme donne sa réponse qui est éminemment politique en confortant la France dans sa conduite judiciaire. Le dossier est clos. A Jean-Baptiste, C’est à 20 ans que l’idéal sublime tout, et lorsque comme toi, devant tant d’incompréhension et de vilénie tenace, mu par ta générosité et fidèle à la mémoire de ton Peuple, tu as voulu avec ton enthousiasme généreux et ton courage, défendre le Patrimoine et l’Identité de tes ancêtres … il arrive que des routes divergentes se croisent : - la tienne, celle du souci de l’avenir de ton Peuple sur sa Terre, - celle de Roussel venant dans une Corse française comme il avait quitté une Algérie française où ôter la vie d’un indigène est du domaine du dérisoire. Ce soir funeste de novembre 1987 tu es tombé dans le guet-apens de la bêtise, de l’ignorance et de la haine. Trois jours après l’assassinat de Ghjuvan Battista Acquaviva, l’Etat français effaçait la dette des agriculteurs corses. DT Bibliographie : Ghjuvan Battista Acquaviva, l’Eternu Sguardu

Ghjuvan-Battista Acquaviva, sempre vivu

Oghje tù ti ne vai a l’ultimu riposuGhjè l’esempiu chè tù ci dai fratellu generosuPurtatu da li toi sin’à l’altu pratuPalatini è Eroi caminanu à u to latu RIPIGLIUMa la to risa canta e schiatta cum’un fioreChì u dulore pianti e sbucci l’amoreChì u furore pianti e sbucci l’ amore.(…)Quì si pensa assai svegliu a lutte l’oreGhjunt’hè tempo di guai e di sgarbe a lu coreDa la corte a la cellula u spiritu in rivoltaA mente cum’un’acella versu tè si ne volta. Parler de Battì tant d'années après n'est pas vraiment un exercice facile mais bon la facilité n'a jamais été notre point fort, amicu. C'est vrai, ça doit faire bientôt 33 ans si je ne me trompe que tu es parti, assassiné par un colon parmi tant d'autres, un occupant parmi tant d'autres. Roussel je crois. La première fois, ce devait être au printemps ou en été après mon évasion, 1984. On m'a dit qu'un jeune machjaghjolu voulait me voir, jeune car j'avais 10 ans de plus que vous. Tu en avais probablement 24 et très rapidement tu m'as appelé le vieux. Sur une route déserte, peut-être du côté du désert des aggriates, la moto est arrivée, vachement bruyante. Tu aimais les motos et a même essayé plus tard de faire de moi un motard, sans succès. Très vite on a parlé tous les deux, probablement durant des heures comme d'habitude. Tu avais le sourire, ton éternel sourire, o croce, et une putain de foi, tu y croyais, nous y croyions tous comme des malades. De cette maladie qui nous a fait vivre à 4, toi Macgyver, Panda, Dob et moi le vieux pendant des semaines, des mois, des années, cette vie commune de frères, de soldats, de militants, de machjaghjoli. Une vie pas toujours facile avec de bons moments et d'autres qui, finalement étaient bons aussi parce que c'étaient nos moments. Je sais que, là où tu es, tu n'en regrettes rien, moi non plus d'ailleurs. La route nous l'avons tracée ensemble, non pas tamanta strada mais passu à passu. Tu sais, je parle de toi parce que nous autres, les trois autres, nous sommes vivants mais toi c'est nous comme nous sommes tous les trois morts un peu avec toi. Battì, nos enfants portent ton prénom, toi tu portes encore nos rêves. Beaucoup de gens parlent de toi, qu'ils t'aient connu ou pas parce que tu le mérites. Tu restes à jamais un exemple, un phare, une lumière, tamanta luce, celle de ton éternel sourire. Des décennies passent mais toi tu demeures. Ne me pose pas de questions, ne me demande pas ce qui a changé, en bien ou en mal. Tu sais, Battì, Panda doit se souvenir d'une de nos dernières soirées, avant mon arrestation, avant qu'il ne te tue. Tu voulais poser le sac parfois, planter des tomates, toi le vigneron. Sur le tard, je plante des tomates et, comme un vieux con, parfois je pense à toi. Oui tu as au moins échappé à ça, être un vieux con mais rassure toi, j'ai retenu tes leçons, je garde le sourire. Ce soir c'était sympa de parler avec toi, de parler de toi. Qui étais tu parce qu'ils veulent peut-être savoir. Tu étais et tu es l'archétype du militant, tu es corse autant si ce n'est plus que nos montagnes, tu es cette eau vive, la seule qui vaille la peine d'être transmise à nos jeunes, à cette jeunesse, à ces générations. Tu es l'eau éternelle à laquelle ils doivent s'abreuver et garder le sourire comme tu as as toujours su le faire avec courage et dignité. Fratellu, simu sempre à fiancu à tè per l'eternu.Carlu PIERI
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