G.F Antolini – A so intervenzione à u primu ministru

Monsieur le ministre, Ghjuvan Filippu ANTOLINI, je suis un ancien prisonnier politique, j’ai été condamné dans l’affaire Erignac et je fais partie du collectif d’anciens prisonniers politiques, PATRIOTTI. Je ne vais pas vous dire que nous avons tous été en Corse extrêmement choqués par vos premières déclarations sur l’affaire de la tentative d’assassinat d’Yvan Colonna. Comme nous avons été également choqués par les déclarations de votre préfet gouverneur qui dès le début, avant même d’arriver en Corse, nous disait que l’Etat français n’était pas assassin et que les gens qui ont manifesté dans la rue se trompaient tous. Les milliers de corses qui descendaient manifester. Je ne vais pas refaire l’Histoire de la Corse, mais je comprends votre pensée, alors qu’il y a quelques semaines seulement, vous donniez la légion d’honneur au commandant Bertolini qui, il y a 40 ans, était arrêté la main dans le sac, en train de venir assassiner le regretté Marcel Lorenzoni. Il a été arrêté juste avant, cela a été extrêmement médiatisé. C’est à ces gens là que vous remettez la légion d’honneur.  

Alors, monsieur le ministre, nous sommes extrêmement choqués que vous puissiez arriver en Corse en nous parlant du rapprochement de Pierre Alessandri et d’Alain Ferrandi et que vous ne soyez pas arrivé avec eux dans vos bagages ! Que vous ne les ayez pas encore fait revenir, sachant les risques qu’ils encourent, sachant qu’Alain Ferrandi a déjà été victime d’une tentative d’assassinat, il y a une quinzaine d’années et sachant tout ce que cela peut engendrer. Le rapprochement que nous avons encore réclamé au cœur de votre Assemblée nationale, il y a quelques semaines, puisque nous y étions le 15 décembre dernier, en disant que la volonté de votre Etat était de les voir mourir en prison. C’était prémonitoire ce que nous disions, c’est malheureusement pratiquement arrivé pour Yvan Colonna. Nous le regrettons et nous avons peu d’espoir que sa situation puisse s’améliorer.  

La revendication que nous portons est la libération de l’ensemble des prisonniers politiques qui restent. D’ailleurs, le petit jeune qui a été incarcéré à Borgu, à la suite des manifestations, nous espérons qu’il n’y aura pas de poursuites contre lui et qu’il sera libéré. Ce serait un geste d’apaisement.  

Nous demandons la libération de l’ensemble des prisonniers politiques parce qu’ils ont tous pris une part prépondérante à la lutte de libération nationale. On vient pratiquement d’en perdre un et s’il avait été rapproché, il ne serait pas dans cet état. Au sujet des libérations, il y a quelques instants, vous nous avez parlé de l’indépendance de la Justice. Monsieur le Ministre, si la situation n’était pas dramatique, cela prêterait presque à rire. Je vais vous parler, dans l’Histoire très récente de la Corse, de l’indépendance de la justice. En 1988, un an avant la loi d’amnistie, tous les prisonniers ont été libérés sur ordre du gouvernement. En 1994, un commando entier de 13 hommes armés et cagoulés, arrêté en plein opération commando, a été libéré à l’époque de Charles Pasqua et de Balladur, en quelques semaines parce qu’il y avait des négociations ! L’indépendance de la Justice, Monsieur le ministre, c’est quand ça vous arrange. Vous avez tout à fait la possibilité de faire beaucoup de chose, même si, médiatiquement, vous ne le reconnaitrez pas, bien entendu. Je vous rappelle qu’en ce qui concerne Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, tous les deux ont obtenu du Juge de l’Application des Peines, une mesure de semi-liberté et le Parquet s’est opposé en faisant appel. Alors que ça n’arrive jamais en Droit Commun, la Cour d’Appel pour Pierre Alessandri est allée à l’encontre du Juge de l’Application des Peines.  

Alors, vous savez monsieur le Ministre, d’autres l’ont dit avant moi. Permettez-moi en tant que Docteur en Archéologie et archéologue de vous dire qu’en Corse, j’ai attesté dans mes fouilles archéologiques que nous avons 10700 ans de présence humaine. 10700 ans ! La présence française, c’est 253 ans ! Nous ne sommes français ni par la langue, même si je la parle la vôtre aujourd’hui.  

Nous ne sommes français ni par la langue, ni par la géographie, ni par l’Histoire. Et nous sommes avant tout monsieur le ministre, Corses !  

Je pense que Gilles Simeoni vous l’a dit tout à l’heure, toutes les îles du bassin méditerranéen ont accès à l’autonomie. Vous avez plus de 90 régions en Europe qui ont accès à une autonomie. Et aujourd’hui, cette autonomie que l’on réclame pour la Corse, on nous la refuse. La reconnaissance de notre peuple, on nous la refuse. Ce sont les revendications qui ont amené les gens dans la rue, qui ont amené aujourd’hui ce collectif à vous rencontrer. Ce sont des revendications qui sont indispensables à nos yeux pour pouvoir retrouver le calme et pour pouvoir avancer vers une Corse apaisée et sereine. La volonté du peuple corse qui l’a manifesté très bruyamment par des dizaines de milliers de personnes dans la rue c’est qu’aujourd’hui on écoute ce que les Corses ont à dire, que Paris prenne enfin la donne de la situation politique en Corse. Je vous rappelle qu’aux dernières élections plus de 70 % des électeurs ont voté nationaliste. Si votre gouvernement n’a pas encore compris qu’il y a un changement en Corse et que nous aspirons à autre chose qu’à de la répression, c’est que vous n’avez rien compris monsieur le ministre. Mais je vous fais confiance pour revenir dans les voies du dialogue, comme vous le faites aujourd’hui en venant à notre rencontre et pour revenir dans les voies de l’apaisement et de l’application des lois pour tout le monde, y compris pour les deux membres du commando Erignac qui sont aujourd’hui libérables depuis plus de 4 ans, bientôt 5 ans. Ils sont accessibles à la libération conditionnelle depuis bientôt 5 ans et on leur refuse obstinément.  

Je vous rappelle que notre revendication principale est la libération des prisonniers et la reconnaissance de notre peuple. Merci Monsieur le ministre.  

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